Mise à jour : 26 janvier 2012 |
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DOSSIER |
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Alexandre CHRISTIANOWITSCH |
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( 1835 - 1874 ) |
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"Esquisse historique de la musique arabe aux temps anciens avec dessins dinstruments et quarante mélodies notées et harmonisées" |
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(Cologne 1863) |
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1- Résumé du livre. |
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Retour sur le livre d'Alexandre Christianowitsch qui porte sur la musique d'Alger au milieu du 19ème siècle. | |||||||
Alexandre Christianowitsch nous raconte sa démarche ou plutôt les étapes de sa quête de ce qu'il appelle "la grande musique arabe". Son voyage le conduit à Alger où il espère trouver dans la musique locale des vestiges de cette ancienne musique. Il fréquente les cafés maures de la ville mais ne découvre en fin de compte quune musique « amoindrie » par trop de fioritures. Ces "surcharges" dans la musique lui paraissent masquer des défauts dans la ligne mélodique ou, plus vraisemblablement, elles compenseraient lincompétence des lorchestres. Il demande donc à écouter de la « vraie » musique. C'est là qu'on lui parle du maître Ahmed Ben Hadj Brahim qui était le musicien du dernier Dey dAlger, Hussein. Mais ce grand maître reste inaccessible... On le met alors en contact avec un mélomane, mais aussi un bon musicien, un certain Hamoud Ben Mustapha qui connaît très bien le répertoire du maître Hadj Brahim. Contacté, Hamoud consent à initier Christianowitsch à la musique arabe. Il commence par l'avertir que ce quon entend dans les rues comme Kadria et autres airs "modernes" nest pas la musique arabe ancienne. Hamoud lui décrit cette ancienne musique ( La Nouba) comme une musique riche et complexe; « une musique qui ne sapprend pas si facilement ». Et là, au passage, Hamoud fait allusion au phénomène de "la rétention" des pièces du répertoire; des pièces quon ne divulguerait pas à nimporte qui... | |||||||
Hamoud le guide donc dans son approche de la musique d'Alger et lui apporte son aide pour écrire sa première mélodie. Christianowitsch constate les différences quil y a avec la musique des cafés surtout concernant les fioritures. Hamoud, écrit-il, savait exactement où placer les fioritures comme il savait lossature de sa musique (c'est-à-dire la ligne dépouillée) | |||||||
Remarque: Christianowitsch prend ici des précautions et nous prépare à accepter sa conception de la notation. Il use de largument de la décadence de la musique grecque ancienne qui était elle aussi surchargée en fioritures pour masquer la pauvreté de la mélodie. Daprès lui, comprendre la musique suppose de saisir la simplicité quil y a dans toute mélodie. Au départ il dit que le rythme lui posait beaucoup de problèmes et il écrit quil a dû forcer Hamoud à séquencer ses mélodies - un exercice très difficile pour les musiciens traditionnalistes - . Curieusement, dans ses transcriptions Christianowitsch ne nous donnera aucune indication sur les rythmes. Il se contentera juste de la signature (2/4 pour la première partie de la Nouba ou 3/4 pour les Niçraf et Khlass ... et même pour des Meçaddar ?!). Il ne donnera pas non plus le découpage du texte (disposition des syllabes lors du chant). Ces "lacunes" rendront la lecture (décodage) des transcriptions très difficile et leur exploitation quasi impossible. | |||||||
Une fois habitué aux airs "légers" (transcriptions de 15 mélodies entre Arubi, Insiraf, chansons de rues), Hamoud lui parle enfin de la NOUBA. Il lui déclare : « En Algérie il ny a que trois individus Hadj Brahim, Sid Ahmed ben Selim, et Mohammed El Mnemèche qui peuvent faire des Noubas. | |||||||
Remarque : Le Mnemèche (Maître de Sfindja) que nous connaissons se prénomme Mohammed Abderahmane (1809 - 1891). | |||||||
Hamoud ajoute: "Excepté ces trois vieillards personne, personne, ne connait les Nouba. » Là, Christianowitsch ira se renseigner sur la nouba. Il nous cite (pratiquement pour la première fois dans la littérature musicale) les cinq phases de la nouba actuelle avec les noms des modes utilisés. Il reprendra le tableau sur létat du répertoire que lui aurait fourni un certain HASSAN BEN HAMMED employé à la bibliothèque publique dAlger pour les manuscrits arabes. | |||||||
Christianowitsch rapporte quil y avait 14 Nouba qui servaient de modèle pour la construction dautres Nouba. Il cite les modes (Tubu') de Nouba. Outre les Sept quil a transcrites (Mjenba, Hsin, Raml, Ghrib, Zidane, Sika, Maya) il ajoute les modes des Nouba fragmentées (c'est-à-dire avec peu de pièces connues) Dhil, rasdeddhil, rast, ramlalmaya, mezmoum et deux Nouba perdues (selon lui) celles des arak et rhaoui. | |||||||
Question 1: La tradition algéroise nous parle bien d'une Nouba Dhil appauvrie et qui aurait été "consolidée" que bien plus tard dans les années 20 avec Ben Teffahi. Pour ce qui est du Rasd ed Dhil, Rasd et Mezmoum ce sont effectivement des Nouba "pauvres" (même actuellement): peu de pièces connues avec certains doutes dans la classification des morceaux. Mais le plus étonnant c'est de voir figurer la Nouba Raml al Maya dans la liste des Nouba fragmentaires, alors qu'elle est une des plus riches actuellement. (?) | |||||||
Question 2: Citer une Nouba Rhaoui qui ne contient aucune pièce soulève des interrogations... Il en est de même pour la Nouba Aarak. Visiblement les renseignements sur l'état du répertoire ont été tirés des manuscrits (textes) sans référer à l'état "effectif" du répertoire (= airs connus). Ou alors le répertoire de ses informateurs ne devait pas être aussi riche qu'ils le prétendaient... Autre éventualité (quoique très peu probable mais à étudier sérieusement): la Nouba Raml-al-Maya algéroise aurait été reconstituée par la suite (?) ; c'est-à-dire dans la deuxième partie du 19ème siècle. [Des indices contenus dans le corpus de la Nouba Raml al Maya pourraient étayer cette thèse.] | |||||||
Tableau de l'état du répertoire d'après HASSAN BEN HAMMED employé à la bibliothèque publique dAlger pour les manuscrits arabes. |
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Remarque: On donne à titre de comparaison le tableau que propose Rouanet pour le répertoire d'Alger. La lecture comparée montre que Rouanet a dû, comme Christianowitsch, se baser sur un manuscrit pour établir son tableau. (car les 19 Niçraf Jarka font référence à des textes et non à des mélodies; sinon, vu les chiffres avancés, on penserait qu'il y a eu une "déperdition" monstre, une hécatombe, entre 1900 (date approximative des travaux de Rouanet) et 1930 (date de la création d'El Djazairia et qui correspond à la fixation quasi définitive du répertoire actuel); ce qui ne serait pas très plausible. On se demande aussi pourquoi Rouanet a repris dans son tableau la Nouba disparue du Rhaoui ? A quoi correspondait-elle ? Visiblement, nos deux auteurs ont dû reproduire un ("même") document de la bibliothèque d'Alger (qui devait citer les modes de Nouba) sans référer aux musiciens. | |||||||
Christianowitsch nous parle ensuite de lorigine de la Nouba. Il dit que deux thèses circulent : lorigine turque (quil réfute à cause des thèmes chantés, des instruments, etc.) et lorigine Maures dAndalousie (quil réfute aussi car il dit que la musique a dû partir dabord vers lEspagne). Pour les musiciens dAlger la Nouba serait si vieille quelle na pas dâge. Et Christianowitsch de conclure : « La Nouba arabe est la grande musique antique de lOrient ; cest la musique des savants artistes de lArabie, la Nouba arabe est la symphonie orientale ! » | |||||||
Pour terminer Christianowiscth nous dit quil aura loccasion de jouer (au piano) une Nouba entière (Raml) devant Hadj Brahim (qui fredonnait les paroles ) pour vérifier sa transcription. Par la suite, le vieux Maître Brahim lui aurait tapé sur lépaule en le félicitant avec un : « Sreqt el çanaa ! » (tu as réussi à dérober luvre, le métier en parlant de musique). Christianowitsch aurait ainsi fait vérifier les sept Nouba par Hadj Brahim. | |||||||
Question: Quand on analyse le résultat des transcriptions de Christianowitsch on peut légitimement remettre en cause cette histoire de "sraqt al çanaa". (ironie algéroise ou sincère compliment ?) A moins que Christianowitsch ne lise autrement les notes qui sont sur les portées ? D'où toute la difficulté pour décoder ses transcriptions; pour les relier à une réalité musicale. Car dans le travail d'analyse on doit supposer qu'il y a un lien plus ou moins "continu" (une logique commune) entre la musique du 19ème et celle, qui nous est plus familière, du 20ème siècle: Une rupture n'est pas envisageable à ce niveau. | |||||||
Dans une autre section de son livre Christianowitsch reprend les grandes figures (musiciens) citées dans le « Kitab Al Aghani »: El Mossili, Maabad, Hubbaba, ... Enfin on trouvera des esquisses qui représentent les instruments de musique et de percussion (treize au total entre; Rebab, Kamandjeh -violon- ; Qanoun -cithare- ; Kwitra -luth traditionnel- ; Gnibri - petite Kwitra en carapace de tortue -; les flûtes Djouak; Gasba; et les percussions Derbouka; Bendir; Târ; Deff; Tbilat; Znoudj). | |||||||
La transcription de sept Nouba avec la traduction des textes (une traduction de très bonne facture réalisée par A. Gorguos) constitue l'essentiel du livre. Des propositions d'harmonisations sont exposées en complément de chaque pièce transcrite. Et, à la fin du livre, des airs de Kadria, Zendani, Haouzi, ... | |||||||
Ce Livre est disponible sur le Net en téléchargement "gratuit" (Google livres). |
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2- Liste des morceaux transcrits. |
La traduction (très bien réalisée par A. Gorguos) nous a permis de retrouver les textes en arabe des Sept Nouba transcrites. Néanmoins certains textes restent encore non-identifiés (mais il est possible de les retrouver en cherchant un peu plus dans les anciens manuscrits). | |||||||
Le point bleu indiquera un titre inhabituel (= non usité dans la Nouba actuelle à Alger). Mais cela ne veut rien dire et il ne faut pas conclure à de "l'inédit". Il se peut aussi que l'air soit connu (contrafacture ou "Qiyyas" sur des airs connus). Par ailleurs certains titres connus pourraient nous réserver des "surprises" et nous proposer des mélodies inconnues. Le dernier mot reviendra donc à l'analyse des transcriptions... | |||||||
Les morceaux sont classés en Meçaddar, Btayhi, Derdj, Niçraf et Khlass dans cet ordre. | |||||||
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3- Analyse de la NOUBA ZIDANE |
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Le Meçaddar |
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Voici ci-dessous la transcription que fait Christianowitsch d'un Meçaddar Zidane. Le texte n'est pas mentionné dans le Diwan Yafil mais on le retrouve dans les anciens manuscrits. La signature du Zidane n'est pas perceptible sur la transcription de Christianowitsch (est-ce une "erreur" de sa part ?); le La (désigné par un point rouge sur le texte musical) aurait dû être altéré (en Lab). Du coup un doute s'introduit dans la lecture qu'on doit faire de la fin de la pièce (qui correspond au deuxième hémistiche du poème): La sonorité reste-t-elle en Zidane (dans ce cas les Mi seront altérés en Mib) ou change-t-elle en Aaraq (avec des Mi naturels et avec une structure rythmique qui fait penser à la Qacida religieuse) ? La signature que donne Christianowitsch pour la fin de la pièce est très inhabituelle dans le corpus de la Nouba. Elle évoque le mode Djarka. (Djarka et Aaraq sont deux modes assez proches qui ne se différencient que dans l'exploitation des degrés de l'échelle musicale de la gamme naturelle de Sol (transposée le plus souvent sur le Ré - voir technique modes -). Nous serions alors en présence d'une combinaison inédite Zidane / Aarak (Djarka)... A moins de revoir et cette signature et de la penser autrement. Notons enfin que pour cette pièce il n'y a pas de Matlaa et ce que Christianowitsch mentionne comme Matlaa n'est en fait que la reprise du premier hémistiche ! | |||||||
Pour avoir une idée de cette transcription on peut écouter le midi correspondant. Ouvrir => Meçaddar-Originel | |||||||
On reconnaît alors dans la première partie de ce Meçadar un air connu de Meçaddar Zidane "Bi Dhimâmi Al Hawâ Wa Husni Al Widâdî" (dans le mètre Al Khaffif). La deuxième partie semble totalement "inédite" et en tous cas très différente de ce qui se fait avec le Meçaddar Zidane " Bi Dhimâmi_l Hawâ" (où l'on change de mode pour passer à ce qui s'apparente à un Ghrib ou à un Raml-al-maya). Le plus curieux c'est de constater que l'esprit de la pièce proposée par Christianowitsch rejoint celui du Meçaddar actuel, à savoir le recours à un mode autre que le Zidane pour chanter le second hémistiche. | |||||||
Le Texte |
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Voici ci-dessous le texte en arabe (dans le mètre Al Bassit) que nous avons retrouvé sur un ancien manuscrit. Le mètre Al Bassit (14 syllabes et 4 paradigmes) est plus long le mètre Al Khaffif ( 12 syllabes et 3 paradigmes). Ce qui revient à dire que le Meçaddar actuel (Bi Dhimâmi_l Hawa écrit dans une forme du mètre Al Khaffif) ne serait qu'une variante "courte" du Meçaddar transcrit par Christianowitsch; du moins en ce qui concerne le premier hémistiche en Zidane. Reste à analyser les seconds hémistiches des deux Meçaddar. Mais déjà on voit qu'il sera difficile de trouver le lien qui les unirait mélodiquement. Nous avons donc affaire à deux pièces distinctes. Par ailleurs le Meçaddar proposé par Christianowitsch n'est pas une contra-facture (Qiyyas) du Meçaddar Zidane (écrit dans le même mètre Al Bassit) "Tahya Bikoum Kullu Ardhin" comme on pourrait facilement le supposer (en se basant sur la forme métrique étant donné que c'est une pièce inconnue du répertoire actuel). Telle est la première conclusion d'une analyse sommaire de la transcription de Christianowitsch pour ce Meçaddar Zidane. | |||||||
Phonétique |
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Tahakkamû Dhalamû Djârû Famâ Aadalû * Fa Aan Qarîbin Ka Anna[1] _l Hukma Lam Yakun(Yakuni) |
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Law Ançafû Nuçifû (Kallâ )[2] Taghû Fa Baqû * Aalayhimu_d Dahra Bi_l Âfâti Wa_l Mihan(Mihani) |
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Fa Açbahû Wa Lisânu _l Hâli Yunshiduhum * Hâdha Bi Dhâka Wa Lâ Aatban Aala _z Zaman(Zamani) |
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[1]. Ici la graphie "kaf / Alif / Nûn " sur le manuscrit doit se lire "Ka'Anna Al Hukma" et non pas "Kâna ... "; tout ceci pour respecter le sens du texte, la concordance temporelle (car avec "3an Qaribin" - bientôt - on introduit un présent proche ) et enfin pour respecter le plus important à savoir la forme métrique. | |||||||
[2]. Le texte du manuscrit présente une syllabe en moins (au niveau du "Lâ" - premier hémistiche-). Avec un "Lâkin" selon un autre manuscrit on retrouverait cette syllabe manquante mais on ferait une entorse à la poésie (car ici nous avons affaire à de la poésie classique de type Qacida et l'occurrence de deux lettres muettes - deux Soukoun - est interdite). La solution presque "naturelle" serait d'utiliser le mot "Kallâ" qui prend le sens de : "Mais oui vraiment parce qu'ils furent violents ..." | |||||||
[3]. La conception du texte avec Yakuni, Mihani, Zamani (= Une Brève + Une Brève + Une Longue = Fa3ilun au dernier paradigme de la forme Al Bassit ) imposerait un découpage spécifique qui serait différent de la conception Yakun, Mihan, Zaman (= Une brève + Une longue = Fa3al). Voir Section Poésie sur le site YAFIL. | |||||||
Transposition |
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Actuellement, le Zidane se fait sur la note finale (Ré) et non plus sur le (La) ou (Sol) comme à la fin 19ème et début 20ème siècle. Une transposition (pour être plus dans le visuel) peut donc aider à la discussion qui va suivre. | |||||||
Pour ce premier hémistiche nous avons "rétabli" la signature Zidane en altérant (abaissant) les notes repérées en Rouge. Pour le deuxième hémistiche le doute persiste sur la lecture (des Mi) mais tout porte à croire que la pièce évolue dans le Aarak (avec des Mi) et avec une signature finale (Si / Ré ) qui évoque un Djarka... (Le doute persiste car la "modulation" vers le Zidane reste possible pour cette signature finale). | |||||||
Pour avoir une idée de cette transposition "retouchée" (avec des Mib pour la première partie) ouvrir le midi correspondant. Ouvrir => Meçaddar-Transposé-Rectifié | |||||||
Lecture-Décodage |
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Le premier hémistiche utilise quatre pavés; c'est-à-dire autant que les paradigmes de la poésie du mètre Al Bassit. Notons que le Meçaddar "Bi Dhimâmi_l Hawa" (voir plus haut) n'utilise que les trois premiers pavés pour le premier hémistiche. Christianowitsch estimerait donc dans sa notation que les pavés 03 et 04 sont identiques. Mais on peut très bien envisager un traitement musical proche avec des pavés qui utiliseraient les mêmes notes mais avec des traitements rythmiques différents. Notons encore que Christianowitsch ne donne pas les paroles, il nous est donc impossible d'avoir une idée précise du découpage du texte. | |||||||
La reprise du premier hémistiche introduit une variation sur le pavé 01. Celui-ci qui va être dédoublé chez Christianowitsch. Il en est de même dans la version du Meçaddar "Bi Dhimâmi_l Hawâ" (mais avec moins de rigueur dans la structure rythmique). | |||||||
Question: Ce dédoublement de pavé est-il justifié pour l'équilibrage de la construction mélodique ? Le pavé additif a t-il sa place ? On devrait répondre par la négative (pour la logique de l'équilibrage). On voit cependant que ce qui s'apparente à un défaut dans l'équilibrage était déjà en usage vers le milieu du 19ème siècle ! | |||||||
Dans un essai de reconstruction il faut s'en tenir à une certaine logique (peut-être discutable). On devrait donc éviter tout ce qui est jugé "étranger" à la construction mélodique (et rythmique) de base. Plusieurs voies restent possibles. Il faut se donner le temps de les explorer. | |||||||
Le deuxième hémistiche: Toute la difficulté résidera dans le décodage de cette deuxième partie. Comment concevoir le découpage du texte ? Christianowitsch signe la première partie du Meçaddar en quatre fois 2/4 (donc une structure rythmique de type Qcid) mais son second hémistiche se présente avec des pavés très irréguliers - avec 3 ; 4 ; 5 et 6 mesures par pavés -. Ceci ne permet pas de signer avec précision la formule rythmique. Que faut-il en conclure : rester avec la même structure (en Qcid) ou alors passer à une autre structure rythmique différente ? | |||||||
Dans une première approche on tentera de trouver une solution dans l'esprit du premier hémistiche; c'est-à-dire une structure en quatre pavés de quatre mesures chacun. | |||||||
Conclusion |
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La pièce transcrite par Christianowitsch n'est donc pas exploitable en l'état; il faudra proposer une réinterprétation (une reconstruction). Si le travail est presque fait pour le premier hémistiche où on peut s'inspirer du Meçaddar actuel "Bi Dhimami_l Hawâ" tout reste à faire pour le deuxième hémistiche... | |||||||
Proposition |
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Voici une proposition pour ce Meçaddar. Elle s'inspire évidemment du Meçaddar actuel (Bidhimami Al Hawa) pour la partie Zidane. Elle conservera ainsi l'esprit de la transcription de Christianowitsch. | |||||||
On adoptera le chiffrage habituel du site Yafil pour transcrire cette proposition (en 4/4 ). | |||||||
Le résultat restera très proche de la transcription originelle de Christianowitsch (quelques durées de note ont été revues; comme il fallait faire un choix pour la signature finale du deuxième hémistiche (ici avec un Mi naturel mais l'attraction en Zidane avec Mib est aussi possible - Note en rouge sur la transcription). | |||||||
On pourra se faire une idée précise des modifications apportées en comparant les deux transcriptions. L'idée première était surtout de conserver : | |||||||
1- La structure en quatre mesures par pavé pour toute la pièce; | |||||||
2- L'utilisation d'une signature dédoublée pour le premier hémistiche (avec deux positionnements par rapport au rythme) en ayant recours au même procédé (pour la symétrie) pour signer la fin du second hémistiche. | |||||||
Pour avoir une idée du résultat => Contacter le groupe | |||||||
Le Btayhi |
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Voici ci-dessous la transcription que fait Christianowitsch d'un Btayhi Zidane. La traduction du texte nous a permis de retrouver la poésie en arabe. Le texte est très connu; c'est un Btayhi Zidane que nous avons déjà exposé sur les pages de ce site. Voir les liens : | |||||||
ou |
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http://membres.multimania.fr/yafil/partition_zidane_btayhi01.htm |
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Encore une fois la signature du Zidane n'est pas perceptible sur la transcription de Christianowitsch; le La (désigné par un point rouge sur le texte musical) aurait dû être altéré (en Lab). | |||||||
On pourrait aussi penser que Christianowitsch aurait perçu une note proche du (La), à mi-chemin entre un La et un Labémol, une sorte de La demi-bémol (?) . Mais cela reste pure spéculation, car le Zidane est plutôt bien "rendu" avec un (La-bémol) quand on le fait (finale) sur le Sol. (Tétracorde [Ré-Mib-Fa#-Sol] transposé en [Sol-Lab-Si-Do]) | |||||||
Le Texte |
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Voici le texte en arabe d'après notre manuscrit de 1844. | |||||||
Phonétique |
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Couplet 1 |
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Maashuq Min Ghaydi_l Hisân * Yasbî_l Uqûl Mahmâ Khatar |
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Ilû Khudaydât Barhamân * Wa_th Thighru Mandhûm Bi_d Durar |
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Man Qad Aghâra_l Khayzurân * Wa Min Sanâh Ghara_l Qamar |
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Mâlû Shabih Wa Lâ Qarin - Haza_dh Dharaf Allah Ma'û |
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'Indu Haçal Qalbî Rahîn - Wa Qad Nafar Min Mawdhi'û |
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Couplet 2 |
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Yaftan Bi Lahdhin In Nadhar * Wa Yaftatin Man Yarmaqû |
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manque un vers |
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Al Husnu Fîh Qa_d Ishtahar * Kayf La Yahîm Man Ya3shaqû |
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Hatta_n Nudjûm Az Zâhirin - Min Nûri Wajhih Sha3shaû |
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Wa Min Khudûdu_n Nayyirîn - Rita_l Kawâkib Yatla3û |
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Vers manquant sur le manuscrit (désigné entre crochets sur la traduction qui accompagne la traduction): | |||||||
çiftu Malak Wahwa Bashar * Ma Fi_l Milâh Man Yalhaqû |
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Transposition |
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Une transposition pour être plus dans le visuel et pour aider à la discussion qui va suivre. La signature Zidane a été rétablie (point rouge). | |||||||
Pour avoir une idée de cette transposition "retouchée" (avec des Mib pour la première partie) ouvrir le midi correspondant. Ouvrir => Btayhi-Transposé-Rectifié | |||||||
Lecture-Décodage |
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1- La pièce (Ghessen) se présente en six pavés plus ou moins équivalents en longueur. Le deuxième pavé signe la structure en quatre fois 2/4 = 16/4. Ce pavé est identique à celui que l'on chante actuellement pour ce même Btayhi. Voir la page consacrée sur notre site (le lien est donné en début de section). | |||||||
Remarque: Le Btayhi actuel ne comporte que quatre pavés (un seul - le deuxième - reste en quatre mesures) ? | |||||||
Revenons à la pièce de Christianowitsch où les trois premiers pavés nous font penser aux trois premiers pavés du Btayhi actuel; des pavés à rapprocher des pavés du début d'une autre pièce classée en Meçaddar Mjenba ... et avec le même texte chanté. "Ma3shûq Min Al Ghayd Al Hisân". | |||||||
(Le Meçaddar Mjenba tout comme la transcription de Christianowitsch nous donne la ligne de base de la mélodie; le Btayhi actuel "brode" sur cette ligne à la façon de la réplique instrumentale). | |||||||
Des cas similaires existent dans le répertoire: deux morceaux classés dans deux Nouba différentes qui débutent de la même façon (sur un ou plusieurs pavés = structure rythmique ) et dont les mélodies respectives prennent des directions différentes par la suite. | |||||||
2- Le cinquième pavé (ligne 5) nous renvoie à un autre Btayhi Zidane, "Lash Ya Aadhab Al Qulûb". | |||||||
3- La mélodie du Matlaa en deux pavés (probablement identiques) fait penser au Matlaa du Derdj actuel (Al Hawa Dal Al Usûd). Mais la transcription de Christianowitsch nous suggèrera trois options: | |||||||
- Une option "courte" (pavés identiques - aux variations près - en trois mesures) et on aura l'air du Matlaa du Derdj actuel ; | |||||||
- Une option "longue" (pavés identiques - aux variations près - en quatre mesures) et on aura quelque chose de plus typée avec une sonorité très teintée de Araq (voire même de Ghrib) ... | |||||||
- Une option (courte ou longue) où le deuxième pavé "bascule" et se différencie du premier par l'introduction du pentacorde Zidane. On retrouvera alors une sonorité qui rappelle une sorte de Sika qui ne se retrouve que dans la Nouba Ghrib (Matlla du Niçraf "Qum Yassir Lana Al Qit"âne" de la Nouba ... Ghrib. | |||||||
Ces versions courtes et longues du Matlaa se déduisent de la transcription (D"court") ou (D"long"). | |||||||
A ce stade de cette analyse sommaire de la pièce de Christianowitsch on peut déjà envisager deux options: | |||||||
Option 1- Ce Btayhi serait une sorte "d'hybridation" de trois pièces du répertoire : Un début (sur au moins trois pavés) comme dans le Meçaddar Mjenba (Maashuq Min Gaydi Al Hisân), une fin de pièce (sur au moins deux pavés) comme dans le Btayhi Zidane (Lash Ya 3adhab) et un Matlaa emprunté à une autre pièce, le Derdj Zidane (Al Hawâ Dhal Al Usûd) qu'on reconnait très bien sur la transcription de Christianowitsch (option avec D"court") | |||||||
On peut aussi envisager l'option longue pour le Matlaa pour rester sur une structure rythmique identique à celle des Ghessen. | |||||||
Ce Btayhi utiliserait alors une signature "singulière" (et inédite) qui serait proche de celles qu'on retrouve dans les Noubate Zidane, Raml ou Mjenba. La fin de la pièce quant à elle sera inspirée de la fin du Btayhi "Lash Ya 3adhâb Al Qulûb" (dans une sorte de restauration pour ce Btayhi Zidane du répertoire courant et qui souffre actuellement d'une signature écourtée.) | |||||||
Option 2- Ce Btayhi n'est qu'une simple contra-facture (Qiyyas) du Btahi Zidane (Lash Ya 3adhab) mais dans ce cas il faudra envisager un autre Matlaa car celui de la transcription de Christianowitsch "ne collerait " avec le début du Ghessen "Lash Ya 3adhab Al Qulûb" qui se fait sur le La (le Ghessen chez Christianowitsch débute sur Sol). | |||||||
Option qui ne serait pas "séduisante" car elle "sacrifierait" le Matlaa et remettrait en cause la transcription de Christianowitsch. | |||||||
Conclusion |
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La pièce que nous propose Christianowitsch contient plusieurs indices qui peuvent nous mettre sur la voie d'un Btayhi cohérent. Mais il faudra la "recomposer", la repenser. En l'état, la transcription ne correspond plus (ou pas) à nos habitudes d'écoute. Etant proche de pièces connues il faudra la "retoucher" en se fixant une logique pour qu'elle n'apparaisse pas comme une mauvaise contra-facture (Qiyyas) de pièces connues mais plutôt comme un montage qui exploite des éléments connus de la Nouba Zidane. Notons que Christianowitsch avait soulevé cet aspect connu chez les musiciens quand il dit qu'il y a des morceaux (de Nouba) de référence qui servent à "construire" d'autres morceaux (Nouba). [Rien ne semble plus à (Zidane) qu'un autre (Zidane)!] | |||||||
Par ailleurs nous avons montré (sur une autre page de ce site, voir lien en début de section) que la pièce qui se chante actuellement reste "trop pauvre" pour un Btayhi et que du point de vue de la structure rythmique elle a certainement dû être écourtée. Nous avons suggéré alors une "restauration" pour le Btayhi actuel sur la base de son deuxième pavé (visiter le lien en début de section). Il se trouve que la transcription de Christianowitsch nous apporte justement des éléments pertinents pour aller dans le sens de cette restauration. | |||||||
On obtiendra alors deux versions plus ou moins "cohérentes" pour ce Btayhi : Une version "longue" (en six Pavés) avec signature d'après la transcription de Christianowitsch et une version "courte" (en quatre Pavés) d'après la version actuelle. Le Matlaa pourra utiliser indifféremment celui du Derdj Zidane actuel (avec les différentes options; courte, longue et avec tétracorde Zidane) ou celui de la version actuelle du Btayhi (qui reprend un des pavés du Ghessen). | |||||||
Question: Pourquoi alors deux versions (potentielles ou plus) pour un même Btayhi ? Serait-ce l'expression de deux (ou plusieurs) "courants" dans la transmission du répertoire en cette moitié du 19 ème siècle; une manifestation de cette musique "plurielle" des Maalem ? Il reste visiblement du chemin à faire pour comprendre toute la dynamique qui a "forgé" le répertoire actuel. Notons que dans ces versions plurielles (que nous retrouvons dans le répertoire et à travers les différentes "écoles") il est toujours possible de retrouver "les germes" d'une supposée version "originelle"... [En fait le problème se pose en termes de versions "cohérentes"; parler de version d'origine pour une tradition orale n'a pas de sens] | |||||||
Proposition |
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Voici la proposition "longue" qu'on pourrait tirer (il existe d'autres solutions) de la transcription de Christianowitsch. La version "courte" (sorte de restauration de la version actuelle) se devinera de suite; il suffit de "rallonger" certains pavés. | |||||||
Pour le début de la pièce on s'est inspiré et on a fait comme dans l'actuel Btayhi Zidane ("Ma3shuq Min Al Ghayd Al Hisân) - voir le lien de la page correspondante en début de section -. | |||||||
L'idée était aussi de se démarquer de l'option de base (la façon simple avec sortie en Sol) notée par Christianowitsch et qui se retrouve aussi dans le Meçaddar Mjenba (Ma3shûq Min Al Ghaydi Al Hisân). (En pratique on pourra combiner les deux façons.) | |||||||
Pour avoir une idée de la transcription (Matlaa version courte façon 12/4) Contacter le Groupe | |||||||
Remarque 1: On pourra passer à la notation en 2/4 pour voir les transformations (minimes) opérées et qui se résument à une égalisation de la longueur des différents pavés présents sur la transcription de Christianowitsch (avec un deuxième pavé inchangé qui peut servir aussi à la restauration de la version "courte" de ce Btayhi - c'est-à-dire sa version courante actuelle -). | |||||||
Remarque 2: La version "courte" (changement de structure rythmique par rapport à celle du Ghessen) pour le Matlaa est une option assez fréquente dans le répertoire algérois. Dans notre cas, la mélodie ressemblera à celle du Matlaa du Derdj Zidane actuel (comme il a été remarqué plus haut). Mais si on veut conserver la même structure rythmique que celle du Ghessen ( 16/4 ) alors il faudra reconstruire une version longue pour le Matlaa; par exemple (et simplement): | |||||||
Cas du Matlaa |
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La "flexibilité des pavés (entre options "longue" et "courte") est fréquente pour les Matlaa (à l'image de certains Matlaa Rasd-ed-Dhil, Raml, Dhil pour ne citer que les cas connus). La tradition algéroise opte pour l'une ou l'autre option suivant les morceaux (la tendance "courte" l'emporte actuellement car il n'y a pas - ou plus - de contraintes sur les structures rythmiques). | |||||||
Concernant notre Matlaa il faut faire remarquer que la version "courte" pratiquée dans le Derdj Zidane (Al Hawa) ne reste pas sur le mode Araq. En effet, on assiste à l'intrusion de la Pente en Raml-al-Maya [La-Si-Do-Ré-Mi-(Fa)] dans le deuxième pavé. Ceci concernera surtout la réplique instrumentale - car le chant ne va pas au-delà du Mi (Pentacorde)-. Mais ce faisant on introduit tout de même une "couleur" Raml-al-Maya (que vient confirmer la réplique instrumentale qui va jusqu'au Fa). Pour notre Btayhi il faudra éviter cette ornementation qui signe en Raml_al_Maya et rester en Araq (comme sur la transcription de Christianowitsch) pour assurer la transition du Redju'. | |||||||
Pourtant le plus "Naturel" avec le Araq(Ghrib) serait d'introduire le Pentacorde Zidane; sachant que ces deux modes participent au jumelage des Noubate. | |||||||
Voici ci-dessous les transcriptions de ces options que permet la version "courte" du Matlaa (façon12/4) (On pouura évidemment "broder" à loisir pour "soigner" la musicalité et les liaisons). | |||||||
Le Derdj |
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Voici ci-dessous la transcription que fait Christianowitsch d'un Derdj Zidane. La traduction du texte nous a permis de retrouver la poésie en arabe. | |||||||
Le texte est très connu et se retrouve dans différentes Nouba (et à toutes les phases): ("Ya Qawmu Ma_w Djadtu çabra"). | |||||||
Ici, le texte présenté et proposé par Christianowitsch "combinera" le Matlaa du Premier Couplet et la dernière strophe (dernier couplet = "Bayt"). | |||||||
Le problème de la signature Zidane demeure; on devrait avoir des (La-bémol) et Mib - repérés en rouge sur la transcription -. Christianowitsch reste constant et persiste à ne pas signer le Zidane. (?) | |||||||
Le Texte |
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Phonétique |
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Matlaa = Qufl (début du premier couplet ) |
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Ya Qawmu Ma_Wdjadtu çabrâ - Hâyam Wa 3aqlî Madhâ Li |
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Afnitu Min Hubbi 3adrâ - Ash Hîlatî Yâ Mawâlî |
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Aghsâne (du dernier Couplet- |
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Ash Hîlata_l Lî Yarâkum * Yabqâ Musaykan Fi Hâlâ |
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Ranî Maridh Min Hawâkum * Mardhî Hawâ Dha_l Ghazâlâ [ 1 ] |
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Ta_l lâhi Mâli Siwâkum * Nahwa_l Milâh Lâ Mahâlâ [ 2 ] |
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Matlaa (fin) |
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[Ashiq Maftûn Dûn çabrâ ] - Hâyam Wa 3aqlî Madhâ Lî [ 3] |
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Afnîtu Min Hubbi 3adrâ - Ash Hîlatî Yâ Mawâlî |
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[1]. Pour rattraper le rythme poétique. La version (texte) Yafil est défectueuse, la traduction le confirme puisqu'elle ne correspond pas au texte arabe de ce deuxième hémistiche. Notre proposition non plus ! | |||||||
[2]. Pour rattraper le rythme. | |||||||
[3]. Premier hémistiche défectif et qui ne correspond pas à la traduction donnée chez Christianowitsch. Il existerait donc une autre version (autre que celle de Yafil) pour ce dernier couplet. Notons que ce groupe de sept syllabes longues peut très bien s'adapter à la mélodie du Matlaa. | |||||||
Transposition |
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Pour avoir une idée de cette transposition "retouchée" (avec des Mib et Sib points rouges sur la transcription) ouvrir le midi correspondant. Ouvrir => Derdj-Transposé-Rectifié | |||||||
Lecture |
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1- On reconnait dans cette transcription de Christianowitsch la structure en : AB-C-AB du Derdj Zidane actuel "Al Hawâ Dhal Al Usûd" ; une pièce qui utilise une poésie en trois hémistiches, le deuxième hémistiche épousant l'air du pavé C. Un Pavé "C" qui nous "pousse un peu trop" sur la voie du Derdj actuel (Al Hawa Dhal al Usûd). | |||||||
La transcription apparaitrait alors comme une sorte de "déformation" du Derdj actuel; très approximative mais reconnaissable. La tentation de l'identifier au Derdj "Al Hawa" est donc très grande. Les "écarts" pourraient être mis sur le compte de la "flexibilité" dans l'interprétation de la musique traditionnelle ou sur une "erreur" de perception de la réalité musicale chez le Transcripteur (ce qui serait très irrévérencieux envers ce musicien; sans doute le premier à avoir laissé une trace écrite de la musique de 19ème siècle). | |||||||
En fait, il faudrait accorder tout le crédit au Transcripteur et cela pour une raison toute simple : Sa transcription apparait plutôt "bien équilibrée" alors que "notre" le Derdj actuel souffre justement de problèmes d'équilibrage. | |||||||
En conclusion la structure en AB-C-AB et l'équivalence des pavés C ne suffisent pas pour identifier .... le Derdj actuel (Al Hawa) avec la transcription de Christianowitsch. | |||||||
2- Si la structure mélodique est en AB-C-AB et que le texte se présente avec deux hémistiches alors on peut admettre qu'il y a soit une vocalise (soit une reprise de paradigme) qui viendrait se placer justement sur la partie (pavé) C. | |||||||
3- Plusieurs options pour le découpage restent possibles car nous n'avons aucune indication sur l'interprétation (structure rythmique) de ce 2/4 dans le Derdj transcrit par Christianowitsch: | |||||||
4- Enfin, et comme pour laisser une porte ouverte vers d'autres lectures: un décodage en 6/4 à la façon d'un Derdj de Tlemcen restera toujours possible si on accepte de modifier (légèrement) les pavés que nous donne Christianowitsch. Car le pavé C (toujours lui) pourrait très bien appartenir au Derdj de Tlemcen. (Voir sur le site notre approche sur les Derdj de Tlemcen) : | |||||||
(Voir notre proposition I pour le Derdj Zidane sur la page http://yafil.free.fr/partition_dossier_derdj_tlemcen.htm ou sur http://membres.multimania.fr/yafil/partition_dossier_derdj_tlemcen.htm ) | |||||||
La transcription plutôt cohérente de Christianowitsch ne nous permet pas d'explorer la piste du Derdj à la façon de Tlemcen (même si ce rythme était -et est toujours - présent dans le répertoire algérois). | |||||||
Décodage |
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La transcription de Chtristianowitch reste équilibrée ... à une mesure près sur le pavé B (carré rouge "à ignorer"). Il n'y a donc pas lieu de la modifier. | |||||||
Le découpage de la forme métrique (Al Muhtath à laquelle appartient le texte) est proposé à titre indicatif (avec le Ghessen du premier couplet). | |||||||
Les triolets sur la transcription de Christianowitsch ont été "résolus" autrement. | |||||||
Par la suite on pourra toujours "broder" pour, par exemple, "modifier" quelques pavés (soulignés en jaune sur la transcription ci-dessous)... plus en fonction d'une perception personnelle que par un quelconque impératif "théorique". | |||||||
Pour le Matlaa on optera par exemple pour la solution en Araq ("courte" ou "longue") pour rester dans la sobriété de la transcription de Christianowitsch. Voir la discussion sur le Btayhi. | |||||||
Conclusion |
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La transcription que donne Christianowitsch du Derdj Zidane est tout à fait exploitable. Mis à part le petit défaut au Ghessen avec cette mesure additive pour soutenir une note finale (sorte de pause vocale, que font souvent les interprètes solistes) - et mis à part le "flou" sur le Matlaa avec ses deux "principales" conceptions possibles. | |||||||
Le découpage restera peut-être délicat à trouver mais on a vu qu'il y a des solutions pour bien placer le texte. | |||||||
La sonorité quant à elle reste peut-être "inhabituelle" avec une "touche" plutôt "orientale" (ou tirée du style Malouf). Mais le Zidane est bien signé notamment ce Fa# sur la première mesure du pavé B pour éviter à la mélodie (construite sur l'échelle descendante du Zidane) d'aller trop vite à sa résidence (Tabyita = Note finale = Ré). | |||||||
Notons que certains interprètes nous proposent actuellement le texte de ce Derdj ("Ya Qawmu ma = :Min Hubbi Hâdha_l Ghazala") comme une contra-facture (Qiyyas) d'un autre Derdj Zidane à savoir "Mata Nastarihu" . Or la transcription de Christianowitsch ne nous permet pas d'entrevoir ce résultat. [De plus les formes métriques de (Min Hubbi hadha_l Ghazala = 8 syllabes) et de (Mata Nastarihu = 6 syllabes) sont différentes et ne définissent pas les mêmes paradigmes.] | |||||||
Au pire (ou au mieux c'est selon) on pourrait envisager le Derdj de Chriatianowitsch comme une Contre facture du Derdj (Al Hawa Dhal Al Usud) - qui, comme nous l'avons écrit plus haut, a la même structure en ABCAB. Ou alors le contraire à savoir que c'est le Derdj (Al Hawa) qui apparaît comme une sorte de version "courte" du Derdj que nous donne Christianowitsch. En fait nous avons à faire à deux pièces proches (par la structure et la mélodie) mais à deux pièces qui seraient différentes (pour le moment rien ne permet de mettre en doute l'ancrage dans la pratique musicale des transcriptions de Christianowitsch). | |||||||
L'art de la contrefacture (Qiyyas) n'est aussi évident qu'il n'en a l'air. Qiyyas (analogie, même démarche dans la conception) ne voulant pas forcément dire "copie conforme"... | |||||||
Proposition |
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Dans cette proposition (Un divertissement) nous avons "modifié" quelques mesures (indiquées en jaune plus haut) mais sans changer la structure mélodique. On coupera la pente descendante de l'échelle du Zidane (première mesure du pavé B) avec un Sol (soutenu) (à la place du Fa# chez Christianowitsch; le Ré qui suit et qui brise le soutien de la note est une sorte d'inflexion vocale (à ne pas faire en réplique instrumentale). Il n'a peut-être sa place que dans ce divertissement. | |||||||
Au Matlaa, au lieu de rester sur l'idée de deux pavés identiques (aux ornements près dans le Aaraq) nous avons testé l'introduction du pentacorde Zidane sur le deuxième pavé. La sonorité résultante (proche d'un Sika transposé sur La) ne se retrouve dans le répertoire que dans un seul morceau classé avec la Nouba ... Ghrib ! [ Le Matlaa du Niçraf "Qum Yassir Lana Al Kit3ân"]. | |||||||
Pour avoir une idée Contacter le Groupe | |||||||
Le Niçraf |
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Voici ci-dessous la transcription que fait Christianowitsch d'un Niçraf Zidane. La traduction du texte nous a permis de retrouver la poésie en arabe. Le texte est connu : ("Bi_l Lâhi Ya Badri" ). | |||||||
Notons encore une fois que la signature en Zidane n'est pas perçue; Christianowitsch semble avoir oublié de noter les La(bémol). Il faudra donc les restituer pour retrouver le mode Zidane qui nous est familier (points rouges). | |||||||
La signature du Matlaa qui associe les Sib (Points bleus) aux Lab ne serait pas "correcte" pour un mode Zidane. Elle apparaît comme une sorte de "modulation" vers un mode Sika (elle annoncerait ce mode). | |||||||
Le Texte |
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Phonétique |
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Bi_l Lâhi Ya Badri * Bi Husnika_l Fâyaq |
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Wa Khaddika_l Djamrî * Wa_l Mabsimi_n Nâtiq |
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Lâ Tartadhî Hadjrî * Li Annanî 3Âshiq |
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A3taf 3Alâ_l Haymân - Mahmâ Tarâ Hâlî |
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Man Nahwâ Fi_l Ghizlân - [ Sid_Al Milâh Ghâli ] |
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Le dernier vers serait repris et, comme dans la version actuel pour le texte, on pourra faire une substitution au second hémistiche avec : [ Nafar Wa Khallâni ] - non porté sur le manuscrit sur notre manuscrit - | |||||||
Transposition - Lecture et Décodage |
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La transposition à la quarte inférieure est plus pratique pour la lecture (car le Zidane est actuellement joué sur la note Ré). Sur la transcription les Mib ont été rajoutés pour faire apparaitre la signature Zidane que ne donne pas Christianowitsch dans sa version). On pourra aussi faire les remarques suivantes sur la structure mélodique: | |||||||
1- Le Ghessen apparait en deux pavés (dont un premier pavé A qui servira au Matlaa); | |||||||
2- Le Matlaa est divisé en deux parties: une première partie avec un seul pavé et une seconde partie qui sera reprise et qui serait composée de quatre pavés (A, B, C, D). A la reprise le pavé C semble manquer (?) Cette structure (reprise des quatre pavés) suggère la présence d'une Tlaliya (vocalise) supportée par les pavés intercalaires B et C. | |||||||
3- Le rythme semble poser des problèmes au transcripteur et cela se remarque à travers les différentes déclinaisons qu'il donne pour des pavés visiblement (ou probablement) identiques : (A, A1, A2 / B1 et B2 / D1 et D2 ) | |||||||
Cette mélodie reste assez proche d'une pièce du répertoire actuel à savoir le Niçraf Zidane "Attir Al Anfas". | |||||||
Pour avoir une idée de cette transcription de Christianowitsch (transposée et avec signatures revisitées); Ouvrir le fichier => Niçraf-Zidane-Revisité | |||||||
Conclusion |
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Comme pour toutes les pièces présentées jusqu'ici (sauf pour le Derdj) il va falloir "retravailler" la pièce en respectant les éléments de rythme (Niçraf), le découpage du texte (avec présence éventuelle d'une vocalise au Matlaa) et les éléments de structure suggérés par la transcription de Christianowitsch à savoir une partie de Matlaa en quatre pavés (ABCD) avec un pavé A tiré du début du Ghessen. | |||||||
Ce texte se présente actuellement comme une contra-facture (Qiyyas) d'au moins deux morceaux. La version la plus courante le présente sur l'air du Niçraf (Ya Ghayat Al Maqsûd). Dans une autre version il est "mixé" avec l'air d'un autre Niçraf Zidane (Tuwayyarî Masrâr , voir Section Partition sur le site). | |||||||
Or les deux Niçraf cités utilisent une même accentuation et celle-ci n'est pas ce qu'on pourrait appeler l'accentuation "naturelle" pour la forme métrique du texte (Bi_l Lâhi Ya Badri). | |||||||
En proposant un air proche d'un troisième Niçraf (Attir El Anfas) Christianowitsch nous confirme quelque part que les anciens adaptaient mieux les formes métriques en choisisant des accentuations plus compatibles et plus naturelles pour la déclamation. Chose qui semble s'être perdue si on en juge par la production des musiciens actuels (depuis le milieu du 20ème siècle... ). | |||||||
Proposition |
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Nous pouvons suggérer la lecture suivante pour cette pièce. Le Niçraf est noté en 8/16 pour la demi-mesure. On pourra passer à la notation 3/4 ( à la façon Christianowitsch ou Rouanet, ou tout autre notation "en vogue" pour le Niçraf (5/8; 22/16,etc.) en faisant coïncider les six percussions de base du Niçraf actuel avec le chiffrage choisi). | |||||||
On constatera en comparant la proposition qui va suivre et la transcription de Christianowitsch que les modifications opérées ont été minimes et que seul le pavé C a subi de "grosses" transformations. Les autres pavés restent (on le pense) dans nos habitudes d'écoute. Notons aussi que cet air (très familier) est repris dans la Nouba Aroubi où nous le retrouvons en Btayhi sur rythme Niçraf (pour dire que Btayhi est une phase de Nouba - une indication de tempo - et pas un rythme particulier). | |||||||
Rappel: Le Niçraf utilise six percussions (t-T-T-d-T-D) dans des rapports : (x)-1-1-(x)-1-1 ; (x) étant le rapport des percussions courtes (1ère et 4ème = temps "court") aux percussions longues (2ème, 3ème, 5ème et 6ème = temps "long"). | |||||||
Voir à ce sujet les propositions sur les rythmes "bichrones" ou "triangulaires" (à base de trois percussions inégales - courtes et longues-) dans le répertoire algérien - quelque part sur les pages du site Yafil - Section Partition.) | |||||||
Pour avoir une idée de la mélodie; Contacter le Groupe | |||||||
Le Khlass |
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Voici ci-dessous la transcription que fait Christianowitsch d'un Niçraf-Khlass Zidane. La traduction du texte nous a permis de retrouver la poésie en arabe: ("Nîrânu Qalbi" ). Ce texte ne se chante plus actuellement (à notre connaissance) dans la Nouba Zidane. Par contre nous le retrouvons en Niçraf-Khlass des Nouba Rasd et Rasd-ed-dhil. | |||||||
Remarque: Toutes les pièces de cette Nouba Zidane (version Christianowitsch) signent en Sol. Et nous voilà en présence d'un Khlass qui signe un degré en La, plus haut. De plus les sonorités de ce Niçraf-Khlass se rapportent plutôt à un mode proche du Sika. Mais les pièces du répertoire qui utilisent cette signature du mode Sika ne se retrouvent pas uniquement dans le corpus de la Nouba Sika. Ces sonorités en Sika sont aussi présentes dans la Nouba Ghrib. | |||||||
(En fait il y aurait des nuances dans l'exploitation des degrés de l'échelle de la gamme naturelle de Mi; certains modes résultants - apparentés certes au Sika - ne seraient pas dans le Sika. Voir section Aspects Techniques). | |||||||
Notons enfin que les premiers tétracordes du Zidane (Ré-Mib-Fa#-Sol) et du Sika (Mi-Fa-Sol-La => transposé en Ré-Mib-Fa-Sol) ne diffèrent que par le troisième degré d'où la très forte attraction qu'exerce le Zidane sur le Sika lors de la signature de certaines pièces. Voir l'article de Rouanet à ce sujet. | |||||||
La question qu'on pourrait alors se poser est la suivante : Que viendrait faire un Khlass (aux sonorités Sika) dans une Nouba Zidane ? (Notons que ce Niçraf est dans tous les manuscrits. Christianowitsch ne l'a donc certainement pas inventé. Le cas mérite réflexion.) | |||||||
Indice 1: Le passage à un autre mode pour le Niçraf-Khlass est pratiqué dans la Nouba actuelle. On retrouve quelques exemples dans le répertoire mais ils passent presque inaperçus tant les modes en présence sont proches. | |||||||
Indice 2: La sonorité Sika étant présente dans la Nouba Ghrib, on pourrait penser que ce Niçraf-Khlass était joué lors du jumelage (Mezdj) des deux Nouba Ghrib et Zidane pris dans cet ordre. Et nous savons que dans le jumelage de deux Nouba le dernier Khlass doit être dans le mode de la première Nouba (=Ghrib). Voir Aspects Techniques. | |||||||
Indice 3: Christianowitsch signe la fin du Niçraf Zidane (Matlaa) en "modulant" vers cette sonorité en Sika (Ghrib). (Voir sa transcription du Niçraf). Christianowitsch propose cette modulation sur un seul temps de Niçraf. | |||||||
Mais on pourrait très bien concevoir la même technique sur toute la dernière mesure du Niçraf pour assurer la transition vers le Khlass... et même changer la note finale du Niçraf en Mi (par une formule mélodique simple) pour assurer la transition vers le Khlass. | |||||||
Le Texte |
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![]() |
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La Phonétique |
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Nîrânu Qalbî * Zinâduhâ Kabidî * Târâ Dumû3î * Qad Ahraqat Khududî (et pas Khudûdî) |
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Ahsanta Ya Laylu * Fî Ta'allufinâ * Bi_l Lâhi Ya Laylu * Tul Wa 3ud Wa Zidî |
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Adhlamta Ya çubhu * Fi Tafarruqinâ * Bi_l Lâhi Ya çubhu * Tub Wa Lam Ta3udî |
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On notera les différences avec la version actuelle. Le texte du manuscrit (proche de la version marocaine) respecte parfaitement la forme métrique (éclatée) du mètre Al Munsarih. Ce qui n'est hélas plus le cas pour le texte actuel... | |||||||
Transposition - Lecture et Décodage |
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Voici la transposition à la quinte inférieure qui signe en Ré pour s'assurer que nous n'avons plus affaire avec un Zidane "commun" mais plutôt à une pièce avec des sonorités Sika (qu'on retrouve dans la Nouba Ghrib) . | |||||||
La mélodie reste assez pauvre car ses motifs sont très "répétitifs" et trop "semblables". Les Pavés D1;D2;D3;D4 sont intéressants car ils rappellent le Niçraf-Khlass de la Nouba Hsin et celui de la Nouba Aaraq. | |||||||
La structure qui se dégage pour ce morceau est en : AAB // CCD1 / D2D3D4// AAB. C'est l'idée qu'on se fait des Khlass à savoir la répétition du premier Pavé A. (La transcription de Christianowitsch contiendrait donc ce "germe authentique" des Khlass). La présence de AAB vers la fin de la pièce suggère que le deuxième hémistiche doit se faire comme le premier. Le CCD1/D2D3D4 au coeur du morceau serait une "longue" vocalise surtout si l'on se base sur la construction des Khlass; en particulier des khlass Rasd et Rasd-ed-Dhîl. | |||||||
Remarque: Ce Khlass n'est pas "tourné" à la façon 6/8 (Baroual) comme le font les Khlass actuels (qui débutent avec un rythme à la "Niçraf". Une complication de plus pour son décodage et sa reconstruction. | |||||||
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Pour avoir une idée de cette transcription on peut écouter le midi correspondant (certaines notes dans cette transposition ont été revues pour les ajuster avec nos habitudes d'écoute - points colorés en rouge -) . Ouvrir => Niçraf-Khlas-Transpose | |||||||
Conclusion |
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Le Niçraf-Khlass de Christianowitsch bien qu'approximatif semble de "bonne facture". Pauvre mélodiquement il vient nous interpeler sur la possibilité de présence de Khlass qui, appartenant (ou pas) à la Nouba, seraient construits sur des Tubu' autres que le Tab Principal de la Nouba. | |||||||
Question: Pourquoi nous n'avons plus de trace de ce Khlass pourtant consigné dans tous les manuscrits connus ; mais curieusement absent du Diwan Yafil (1904) ? | |||||||
Proposition |
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Voici un "essai" de relecture de la transcription de Christianowitsch. La proposition reste dans les sonorités attribuées au Sika ou à des dérivées qu'on pourrait retrouver dans d'autres Nouba (comme le Ghrib). Le "motif " mélodique semble familier et rappelle des airs populaires de Qadria-Zendani. | |||||||
Enfin, ce Niçraf-Khlass n'est pas "tourné" à la "Barouali" (écriture façon 6/8); mais vers la fin de la pièce (pavé E) on peut entrevoir cette possibilité comme dans les Khlass actuels. | |||||||
(Un travail de recentrage du rythme est toutefois nécessaire pour reconstruire la pièce à la façon "Barouali".) | |||||||
Nous noterons " l'attraction " vers le tétracorde Zidane à la fin de la pièce (pavé B ) - note bleue qui appelle un Fa# -. | |||||||
Les modifications apportées à la transcription de Christianowitsch: |
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Les pavés ont été réécrits en fonction du rythme Niçraf-Khlass en respectant la succession des notes présentes chez Christianowitsch. La comparaison des deux transcriptions (conceptions) apportera quelques éléments pour comprendre la manière de transcrire le Niçraf utilisée par Christianowitsch. | |||||||
Une exception cependant est à noter. Elle concerne le pavé B : | |||||||
- La première fois - notée B* - nous avons utilisé l'idée d'une finale suspensive que nous retrouvons dans le Niçraf_Khlass (les mêmes paroles, Niranu Qalbi ) de la Nouba Rasd-ed-Dhil. | |||||||
- Le début du pavé C - noté C* - a été modifié en conséquence pour assurer la transition. (Notons que ce pavé se retrouve aussi dans le Khlass Rasd-ed-Dhil). | |||||||
Les autres pavés restent au "plus proche" de la transcription d'origine. | |||||||
Transition vers le Khlass: |
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1- Si on procède à une " modulation " vers le genre Sika à la fin du Niçraf mais sans changer de note finale (Ré) alors le Khlass sera joué en Ré (comme sur la transcription). | |||||||
2- Mais si on procède à une "modulation" en ayant recours à une formule suspensive qui nous amènerait sur le Mi - à la fin du Niçraf; alors il faudra transposer le Khlass. | |||||||
Pour avoir une idée de cette proposition (plutôt inédite dans la Nouba Zidane - mais nous ne sommes pas au bout de nos surprises -) Contacter le Groupe | |||||||
BILAN DE LA NOUBA ZIDANE DE CHRISTIANOWITSCH |
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La Nouba Zidane transcrite par Christianowitsch, même inexploitable en l'état, nous permet d'envisager des pièces plus ou moins cohérentes. Elle suggère - après un "gros" effort d'analyse - qu'effectivement l'auteur a pu saisir "quelque chose" de la pratique algéroise de son temps. Mais on ne peut pas pour autant justifier le "sraqt al çanaa" que lui aurait adressé El Hadj Brahim. Bien entendu on aurait aimé retrouver des éléments suffisants sur les rythmes, sur les structures mélodiques, sur les échelles et sur le découpage du texte (syllabes sous les notes), ce qui aurait apporté un plus pour notre étude mais aussi pour le livre de Christianowitsch. | |||||||
Plusieurs enseignements se dégagent tout de même à travers cette analyse : | |||||||
1- La transcription: Les "pavés" de la musique çanaa apparaissent comme flexibles, modelables... et vivants. La notation musicale n'aura donc pas pour but de les fixer (ce qui serait vain tant les "fluctuations" sont nombreuses comme il serait vain de vouloir surcharger la transcription). L'idée est d'utiliser la transcription (simple) pour mieux saisir "l'esprit" qui donne corps à la musique. Sur ce dernier point Christianowitsch a réussi sa transcription de la Nouba Zidane puisque nous pouvons déjà envisager des pièces "cohérentes" voire même "inédites" (Meçaddar, Btayhi, Derdj et Khlass). Le Niçraf apparaît lui aussi comme un "inédit" puisqu'il aura recours à une contrefacture (Qiyyas) plus "cohérente" du point de vue de la structure rythmique (accents) que celles (au moins deux versions) qui sont pratiquées actuellement. | |||||||
2- Le Mezdj des Tubu': Le deuxième enseignement suggère que le Zidane reste "couplé" (jumelé) au mode Aaraq (dans ses formes en Ghrib); c'est-à-dire que les Matlaa ont tendance, le cas échéant, à changer de mode. Cet aspect est bien connu. Or c'est ce recours "exclusivif" au Aaraq pour les morceaux en Zidane qui n'a pas été relevé. Notons qu'il existe une façon codifiée de combiner deux Nouba qu'on appelle Nouba Mezdj (jumelée) et que les deux Tubu' Ghrib et Zidane participent au même Mezdj (modes liés). | |||||||
Remarque: La pratique actuelle (dans certaines pièces du Zidane) qui consiste à "élargir" l'ambitus réduit du Aaraq (pauvre mélodiquement) pour le faire ressembler à un Raml-al-Maya (riche) serait donc une erreur. | |||||||
3- La problématique de la Nouba Ghrib: L'intrusion du Khlass avec ses sonorités en "Sika" (quand on l'analyse en fonction du deuxième point ci-dessus) vient nous rappeler la "problématique" de la Nouba Ghrib. | |||||||
Cette Nouba contient au moins deux classes principales de morceaux: | |||||||
a) Une classe de morceaux qui utilisent l'échelle de la gamme naturelle de Ré de type Aaraq basé sur le tétracorde [Ré-Mi-Fa-Sol] où l'intrusion des ( Fa# et Do#) reste très rare (les morceaux avec des Fa# = Gamme de Sol transposée en Ré ou avec des Fa# et Do# = Gamme de Do transposée en Ré constituent une sous-classe minoritaire dans cette Nouba.) | |||||||
b) Une classe de morceaux qui ont cette sonorité Sika et qui se jouent sur la note finale Mi. Le Tab' utilisé est basé sur le tétracorde [Mi-Fa-Sol-La] exactement comme pour le Sika. Or ces morceaux de la Nouba Ghrib se distinguent de ceux qui sont classés dans la Nouba Sika par "l'attraction" qu'exerce sur eux le Tab' Zidane qui transforme souvent le "Sol" en "Sol#" (et qui évite autant que possible les Sibémol présent dans la Nouba Sika - Voir Aspects Techniques sur les modes). Alors Ghrib, Sika ou Tab' qui n'a plus de nom (disparu), la question reste posée. | |||||||
Cheikh Sadek El Bedjaoui (voir Album çanaa) avait émis une théorie sur ces morceaux aux sonorités "Sika" qu'on retrouve dans la Nouba Ghrib. Il expliquait que cela signerait la présence de modes avec micro-intervalles; avec des secondes neutres à 3/4 de ton qui tantôt s'exprimeraient en secondes mineures et tantôt en secondes majeures suivant le "parcours" de la mélodie. | |||||||
Notons enfin qu'on retrouve cette sonorité Sika dans certains Niqlab Aarak (des musiciens actuels ont "osé" les déclasser en Sika). Par ailleurs on pense qu'il existe au moins un Niqlab Sika (actuel) qui devait appartenir à l'origine à la Nouba Ghrib où il était classé en Derdj... !? | |||||||
4- Le Répertoire: Cette transcription permet de tirer des pièces pratiquement "inédites"; à l'exemple du Meçaddar qui peut être considéré en partie comme étant à l'origine du Meçaddar (actuel)- Bi Dhimâmi Al Hawa - .Le Btayhi et le Derdj soulèvent la problématique de l'art de la contre-facture (Qiyyas) qui apparaît (avec les transcriptions de Christianowitsch) comme "un remodelage" des pavés alors qu'on a souvent tendance à penser le Qiyyas comme une simple "copie conforme" d'une mélodie à laquelle on met de nouvelles paroles. | |||||||
5- Le Khlass: Avec ce Khlass Christianowitsch nous offre un troisième exemple où le Tab' (mode) utilisé ne semble pas appartenir au Tab' principal de la Nouba. Les deux autres exemples connus sont le Khlass Maya (qui signe en Ré alors que le Maya est joué en Do) et le Khlass Rasd-ed-Dhil (qui signe en Fa): Simple signature d'un Mezdj, Manifestation de modes "disparus", Technique propre au Khlass qu permettrait d'annoncer la Nouba à venir (qui suit)... ou fantaisie du classement des morceaux ? La question mérite d'être examinée, d'autant que le Khlass est la pièce la plus "complexe" du point de vue de la composition musicale. | |||||||
6- Histoire: La lecture des programmes des sept Noubate transcrites par Christianowitsch suggère qu'il y a eu une nette "déperdition" du patrimoine musical transmis. Et l'analyse de la Nouba Zidane le confirme quelque part puisqu'elle apparaît totalement "inédite": On se demande même comment cela serait possible ? | |||||||
Cette déperdition se serait produite entre 1863 (date de parution du livre) et 1900 (date des premiers enregistrements sur disques). Période où "un ressort" de la mécanique du patrimoine s'est rompu. | |||||||
Notons que l'un des Maîtres de l'époque était Mnemèche (cité par l'auteur) et que le futur Maalem Sfindja devait déjà être sur le circuit (21 ans). | |||||||
Comment "pondérer" tout cela à une période qui a connu d'énormes bouleversements notamment avec la condition des juifs algériens qui ont changé de statut (devenus citoyens français avec le décret Crémieux en 1870). | |||||||
En 1863, date de parution du livre de Christianowitsch, les musiciens juifs ( selon l'auteur ou plutôt selon ses informateurs et ses guides dans le vieil Alger) étaient des musiciens de seconde zone. Ils se produisaient dans les cafés, faisaient de la musique "légère" et très peu d'entre eux maitrisaient l'art de la Nouba (la "vraie" musique ancienne - d'après l'expression de Christianowitsch). Une certaine "rivalité" (affichée) entre musiciens musulmans et juifs est décrite dans le livre de Christianowitsch qui ajoute que les musulmans (musiciens) faisaient de la "rétention" de patrimoine et prenaient des précautions pour éviter que des morceaux rares ne tombent dans les mains de musiciens juifs. [cite l'exemple d'un Meçaddar Mjenba]. Quel crédit apporter à ce témoignage de Christianowitsch ? Sachant que des formations comme celles de Sfindja étaient "mixtes" et comportaient des musiciens des deux religions... | |||||||
Les musicologues pourraient nous éclairer sur ce pan de l'Histoire musicale. | |||||||
A Suivre : L'analyse des autres Nouba.... |
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Les "bonnes surprises" trouvées dans cette Nouba Zidane nous encouragent à explorer les six autres Noubate, non pas pour espérer trouver des réponses à certains problèmes rencontrés dans le répertoire actuel mais pour mettre un peu d'ordre dans l'histoire du répertoire algérois depuis le milieu du 19ème siècle. | |||||||
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