Mise à jour: 05 Mai 2010

 

Le Derdj dans la Nouba de Constantine

Une pièce maitresse dans le puzzle de la Nouba algérienne.

 
Une modeste contribution (d'un non initié) au répertoire dit "Malouf".... Une façon de rendre un hommage à tous les Chouyoukh que nous avons connus et appréciés (Cheikh Toumi, Abdelmoumen Bentobal - Allah Yarmamhom!-, au cheikh Qaddour El Darsouni, Hadj Fergani, Dib Al Ayyachi, Hamdi Bennani... et à tous ceux qui font vivre le genre "Malouf".... En espérant que le sujet choisi sera à la hauteur..... Et un petit cadeau aux contacts du groupe YAFIL qui ont émis le voeu de voir du Malouf sur ce site...
 
Dans la Nouba dite de "Constantine" (Il y a aussi une tradition du Malouf bien ancrée dans d'autres villes comme Annaba ou Skikda ... par exemple. Mais nous ferons sourtout référence à Constantine pour la suite de cet exposé; juste parce que la documentation provient de Constantine.), le Derdj ("traditionnel") se placerait juste après le Meçaddar. Ce qui fait de lui la deuxième phase vocale de la Nouba Malouf... On peut même s'avancer et dire le deuxième "cycle rythmique" de la Nouba.
Mais pour certains maîtres le Derdj viendrait en troisième position tout comme dans la Nouba d'Alger et de Tlemcen. C'est dire que cet aspect technique (organisation de la Nouba) n'est pas tout à fait "réglé" chez les musiciens de Constantine. (?)
( A Alger et à Tlemcen le Derdj se place en troisième position juste après le Btaïhi. Cependant les pièces classées en Derdj à Alger et dans une moindre mesure à Tlemcen n'ont pas une structure rythmique unique - c'est-à-dire qu'on y retrouve plusieurs rythmes -. Aussi il est plus prudent et plus juste de parler de phase vocale dans ces deux répertoires.)
L'introduction récemment (*) dans le répertoire de Constantine d'un deuxième rythme pour le Derdj (noté en 8/8 et dit Derdj "Thaqil" ou lourd ) et même d'un troisième rythme (noté 12/8) (**) voire d'un quatrième rythme façon "valse" à 3/4 (plus ou moins "douteux" si on analyse la position des accents) ne fait qu'ajouter à la confusion régnante. Ces rythmes multiples pour une même phase aligneraient donc le répertoire de Constantine sur ceux d'Alger et de Tlemcen.
   
On ne connaitrait que trois Derdj pour les dix Nouba dites complètes à Constantine. (*)

- Le Derdj de la Nouba Raml_al_Maya : Mata Nastarihu ;

- Le Derdj de la Nouba Maya : Dhaw'u al çabah;

- Le Derdj de la Nouba Zidane: Bu'du_d Diyyar.

Plus un Derdj Dhîl aqui urait été "retrouvé"; ce qui porte à quatre le nombre de Derdj.
(*). La Musique du Constantinois par Maya Saïdani Casbah éditions 2005
(**). Voir l'article de notre ami Hichem Zoheir Achi sur: http://hichemachi.blogspot.com
 

Aspect Technique

(Première propriété)

 
Ce Derdj Constantinois (dit "traditionnel") évolue sur un rythme "spécial"à trois temps de base accentués D T T. Il est noté et considéré - peut-être trop schématiquement - comme un 5/8... (?)
Le 5/8 imposera les rapports [0,5 - 1 - 1 ] entre les trois percussions. Les temps 2 et 3 seront d'égales durées et le premier temps sera deux fois plus court que les deux suivants.
Dans la pratique on perçoit un rythme moins "carré" que le 5/8. On verra par la suite que cela revient à reconsidérer à la hausse (>0,5) le rapport de la première percussion aux deux autres.
La mesure est quant à elle jouée en 1,2 seconde environ chez presque tous les interprètes. On fixera donc le métronome en conséquence pour les illustrations musicales.
La structure rythmique du Derdj combinera toujours deux cellules (évolution en groupe de deux mesures de base) : une caractéristique commune à plusieurs rythmes.
   
Dans l'ensemble, et pour faire le lien avec le répertoire d'Alger, le Derdj de Contantine nous rappelle le rythme "Msam'ii" utilisé - à Alger - dans le répertoire des genres apparentés (Arûbi, Hawzi et autres Zendani). Son analyse posera donc les mêmes problèmes techniques.
Au sujet de la perception des rythmes on pourra consulter la page (non actualisée ) sur le Derdj Arubi "Qaddak Yasbi al Ruh wal Aqal" : partition-qaddak.htm
   
La perception d'un rythme (dans le fractionnement de la mesure ou de la séquence des temps) et surtout celle de sa restitution sur un instrument à percussion est plutôt un phénomène complexe; phénomène qui n'a rien à voir avec la convention adoptée pour le chiffrage du rythme en vue de le transcrire. La philosophie de toute "bonne" transcription étant d'utiliser "le minimum" de signes, on comprend alors que toute transcription ne sera qu'une simplification de la réalité musicale... au demeurant d'une réalité qui risque d'être impossible à rendre sur du papier à musique.
Notre expérience personnelle nous fait percevoir le Derdj Constantinois comme un rythme où le premier temps se situe dans une fourchette de valeurs comprise entre [0,58 et 0,62].
Cette fourchette de valeurs est générée par plusieurs facteurs (incertitudes sur les mesures, perception du rythme pas assez développée chez l'analyste, etc.) Le rythme lui ne souffrirait d'aucune ambigüité chez le musicien traditionnel (le percussionniste) qui le restitue sans jamais se poser de questions.
Ceci nous suggère que la "réalité" du rythme Derdj de Constantine est loin du 5/8 "carré" préconisé pour son écriture.
 
Le tableau ci-dessous résume le phénomène de Perception / Restitution des rythmes à trois temps de base, en fonction de l'estimation qu'on fait de la première percussion; une estimation approchée par une fraction qui déterminera la division de la mesure en 5, 18, 31, 47, 63, 8, 11 ou 3 parties. Sachant que d'autres possibilités sont envisageables suivant les valeurs qu'on se fixera pour le rapport de la première percussion.
Les chiffrages proposés (assez "fantaisistes" du point du solfège) ne seront là que pour illustrer le fait qu'il est toujours "possible" d'écrire un rythme quelque soit son degré de complexité pourvu que le rapport entre percussions (les temps de base) reste rationnel; c'est-à-dire que ce rapport peut s'exprimer avec une fraction simple - dans un rapport de deux nombres entiers -.
Cette idée de rechercher des rapports simples dans les phénomènes est assez ancienne (Théories Pythagoriciennes). Une très bonne première approche qui reste valable dans plusieurs disciplines.

Lecture: Le Derdj de Constantine se démarque très bien du rythme Msamii (qui se situe lui dans un rapport inférieur à 0,60) comme il se démarque du rythme Niçraf (qui se situe de son côté dans un rapport supérieur 0,65). Plusieurs possibilités de chiffrage resteront possibles pour exprimer toutes les valeurs comprises dans cette fourchette de perception.
 

Aspect Technique

Deuxième propriété

   
Une deuxième particularité du rythme Derdj de Constantine concerne la division de son 2ème temps de base. Cette division en deux parties n'est pas (ou ne serait) pas symétrique. Dans le groupe des deux temps résultant de cette division du 2ème temps de base le premier temps semble plus "court" que le second.
Cet effet "d'accélération" (les percussions sont qualifiées de "mues" ou "mobiles" et non pas de "successives" comme dans un rythme "carré") fera toute la différence dans la perception de ce rythme.
 
A ce titre la représentation de ce rythme faite par le Cheikh Qadour Darsouni mérite une attention particulière car elle nous suggère un rythme composé où le troisième temps de base (Voir page 276 du livre de Maya Saïdani) est séparé des deux autres temps de la mesure. Une segmentation (fortuite ou pas) qui traduirait une "réalité" musicale : Le troisième temps de base du Derdj Constantinois n'est jamais fractionné ! Le seul temps fractionné sera le deuxième temps de base du Derdj.
   
Cette division quasi "naturelle" des temps s'obtient quand on joue ce rythme (à deux mains !) sur un instrument à percussions. Et ce serait cette division du 2ème temps :" D [T+T] T " qui nous fait penser (quand on ignore l'effet d'accélération) à une division de la mesure du Derdj Constantinois en cinq (5) parties ( le temps trois - 3 - semble durer deux fois plus que les autres). Voir tableau ci-dessous.

L'effet d'accélération fera jouer au temps (2b) le rôle de pivot dans la mesure du Derdj comme pour réaliser une symétrie "en escalier" qui fera en sorte que dans le calcul des durées on aura les deux relations:

Durée de ( 1 + 2a ) = Durée de ( 3 )

Durée de ( 2b ) = Durée de ( 1 )

   
Le deuxième temps se divise donc de la même façon (dans les mêmes proportions) qu'on divise la mesure en deux parties. Cet effet d'accélération peut être rendu avec tous les chiffrages proposés pour le Derdj Constantinois... Mais il est impossible à rendre avec un 5/8.
- Pour le 9/16 ce sera une division en [3+4] parties du deuxièmetemps; pour le 31/32 ce sera en [5+7]; pour le 13/16 en [2+3]; pour le 47/32 en [7+11] et pour le 63/32 en [3+5] parties. Et ainsi suivant le nombre total de parties qu'on se fixe pour la mesure. Voir le tableau ci-dessous.

   

Parenthèse Une : Le Nombre d'Or.

On peut s'amuser et visualiser le rythme Derdj. Voir la planche ci-dessous.

Les trois temps du Derdj sont illustrés par des secteurs en bleu, marron, vert, le nombre de parties dans la mesure est indiqué au centre des couronnes accompagné du rapport rationnel du premier temps au deuxième temps.
Nous avons dit que notre meilleure "perception" de ce rythme se situait dans la plage [0,6- 0,62] Or c'est dans cette plage que se situe la division qui se fait suivant le "Nombre d'Or" (En rouge sur la planche)
Le point noir (sur la planche) indique une avance donc une anticipation du deuxième temps - (quand il est en zone rouge = percussion avec un rapport inférieur à l'inverse du nombre d'or) ou un retard (dans l'arrivée de la deuxième percussion; point noir hors zone rouge).
   
Rappel: Le nombre d'or est une proportion observée dans certains phénomènes physiques et biologiques. Il rendrait compte d'une esthétique "supérieure" observée dans la Nature. Il a beaucoup été utilisé dans différentes branches scientifiques mais surtout pseudo-scientifiques.
Une proportion liée au Nombre d'Or n'est pas une "cause". Ce serait au mieux une "conséquence" liée à des phénomènes pas très bien étudiés. .
Le nombre d'Or est aussi en relation avec la série de Fibonacci (Leonardo Fibonacci dit Léonard de Pise mathématicien italien qui séjourna à Bejaïa au début du 13ème siècle et qui participa à la propagation des chiffres dits arabes). La série de Fibonacci étant [ 1 , 1 , 2 , 3 , 5 , 8 , 13 , 21 , 34 , 55 , 144 ... ] où chaque terme est égal à la somme des deux précédents. Le rapport des termes de rangs élevés tendra vers le nombre d'Or = 1,618033988... Le nombre d'Or est un nombre irrationnel; c'est-à-dire qu'il ne s'écrit pas sous forme de fraction entière. On retrouve aussi des proportions "dorées" dans le pentagone, le décagone, l'étoile à cinq branches...
Evidemment une telle division "irrationnelle" (liée au nombre d'or) ne peut pas être transcrite avec les moyens du solfège.

Il sera assez difficile de faire la différence entre toutes ces représentations (sourtout celles des 13, 47 et 63 parties) tant elles sont proches. (Il faudra alors se concentrer sur le 3 ème temps pour sentir la différence!)
L'image en "l'escalier" (fraction continue) du rapport 0,618 aussi séduisante soit-elle ne justifie pas le nom du rythme. Il faut chercher ailleurs l'origine de l'appellation "Derdj"...
Derdj veut dire aussi escalier. Le mot est aussi en rapport avec la manière de marcher d'un pigeon.
   
En écrivant le rythme en deux parties (comme le fait Darsouni) on suppose donc une segmentation en deux parties. Or si la plus petite partie (b) est à la plus grande (a) comme la plus grande (a) l'est au tout (a+b) alors la proportion (la segmentation en deux parties) est dite "dorée": (Définition même du nombre d'Or)
Le deuxième temps se divisant aussi suivant le nombre d'Or; on pourrait donc oser la notion de rythme "doré" pour décrire le Derdj de Constantine.

 

Parenthèse Deux : Loi de l'escalier ou loi de Blondel

   

( 2 fois la hauteur de la marche ) + ( La largeur de la marche) = 59 à 64 cm

   
C'est la loi de Blondel (Mathématicien, architecte français du 17ème siècle) pour la conception d'un "bon" escalier.
Sachant que 17 cm est considérée comme une hauteur "idéale" pour un escalier; on voit que le rapport H/L (hauteur sur largeur) pour un escalier doit se situer dans la fourchette: [0,566 _ 0,680]
Coïncidence ? Cette fourchette est curieusement celle de la perception de nos rythmes Msamï, Derdj Constantine et Niçraf ; les rythmes dits "complexes" et à trois temps de base dans le répertoire.
D'un autre côté un escalier "doré" (H/L = 0,618) qui obéit à la loi de Blondel aura une hauteur de marche comprise entre 16,30 cm et 17,68 cm. Une question se pose alors : Est-ce que les architectes sont guidés par la seule "perception" qu'ils ont du "beau" ou est-ce des considérations mathématiques et "mystiques" (comme celles liées au nombre d'Or) qui ont fini par dicter certains canons... comme cette hauteur "idéale" de 17 cm ?
   

Aspect technique

Troisième propriété

 
Le dernier aspect du rythme Derdj de Constantine est lié à son l'accentuation.
Le premier temps Doum est en réalité un temps "faible" dans le sens où il ne supportera aucune syllabe accentuée de la poésie. Ce temps servira de support aux syllabes courtes et aux syllabes additives ou "emphatisées" qu'on retrouve dans la poésie.
Aussi l'entrée dans le rythme Derdj de constantine se ferait plutôt (et souvent, car lié aux types des poésies) sur le début du deuxième temps: d'où certains flottements qu'on pourrait observer au début de ces Derdj ... comme un "temps mort" que ferait le percussionniste avant de se "caler" sur le rythme.
 

Pour la suite

 
Dans ce qui suivra nous adopterons l'écriture façon " 5/8 " pour transcrire la musique mais sans utiliser le chiffrage de la mesure qui sera remplacé par la mention "Derdj Constantine".
La restitution "correcte" du Derdj de Constantine devra tenir compte de la discussion précédente:
: Un premier temps qui se situe dans un rapport de 0,60 plutôt que le 0,5 du 5/8 ;
: Un effet d'accélération dans l'exécution de la division "en escalier" du deuxième temps
   
Pour y arriver, une seule méthode : écouter, écouter, écouter. Un rythme se vit de l'intérieur.
   
Nous comptons donc sur les gens du Malouf (certainement plus imprégnés que nous de ce rythme) pour nous donner un avis éclairé s'ils consentent à se soumettre à notre "petite" expérience de perception rythmique. (*)
(*). Il existe des moyens plus sophistiqués pour "scanner" les rythmes mais on préfère se fier aux musiciens. On aurait tort de confier la musique aux machines.
Des fichiers Midi seront proposés pour illustrer le phénomène de perception du rythme. Il s'agira de choisir la version qui vous semblera la plus rapprochée de la version enregistrée. (L'expérience se fera à l'aveugle, sauf pour le 5/8 qui illustre la transcription schématique du Derdj.)
 

Derdj de la Nouba Raml-Al-Maya

 
Transcrit sur la base d'un enregistrement de l'association Maqam de Constantine; voici le premier Derdj en notation 5/8. Le texte de ce Derdj correspond au deuxième couplet de la poésie connue "Mata Nastarihu".
L'introduction à ce Derdj (en guise de Kursi) utilise le Djouab (réplique instrumentale) des ghessen.

Pour écouter l'Association Maqam : Ya Qalbi Taçabbar
Pour avoir une idée de la transcription; voici le fichier en 5/8 : Fichier 0
 

Parenthèse Trois: Test de perception du rythme.

 

Voici cinq fichiers pour tester la perception du rythme et le rendu d'une transcription

Fichier 1 , Fichier 2 , Fichier 3 , Fichier 4 , Fichier 5

La différence est-elle perceptible ? Quelle serait la version la plus proche de l'enregistrement ?

   

Le texte

   

Pour le premier couplet de ce poème voir notre page : partition_mezmoum_niqlab01.htm
   

Traduction littérale :

Ô mon coeur patiente * Et ne perds pas espoir

Chaque chose est prédestinée * C'est écrit sur ton front

Tu retrouveras ton ami * Et Dieu t'aidera en cela

Mon voeu est de les revoir / Dans d'heureuses circonstances

Jamais je ne les oublierai / Ils me manquent (ne me facilitent pas la vie)

 

Phonétique:

Ya/Qal/Bi/Ta/çab/Bar * Wa/Tha/Bat/Ya/Qi/Nak

Kul/Lu/Shay/Mu/Qad/Dar * Mak/Tub/Fi/Dja/Bi/Nak

Bil/Mah/Bub/Tadh/Far * Wal/Maw/La/Ya/ii/Nak

Maq/ça/Di/Na/Ra/Hum - Fi/Sa/aa/Ha/Niy/Ya

Um/Ri/Ma/Nan/Sa/Hum - Ma/Ha/Nu/aa/Liy/Ya

   

Derdj de la Nouba Maya

 
Transcrit sur la base d'un enregistrement du Grand ensemble El Mawsili de St Denis & El Djazaïria El Mossilia d'Alger ( Concert donné à la Basilique de St Denis le 05 juillet 2003).
L'introduction au Derdj est identique à la réplique instrumentale des Ghessen. Notons la légère différence entre ces deux lignes mélodiques en début de pièce - mesure 2, 3 - !
Au troisième Ghessen l'ensemble introduit une variation (changement de hauteur de la note; technique souvent utilisée pour les troisièmes vers) dans l'attaque de la première mesure.
Nous n'avons retenu que le deuxième couplet pour la transcription, mais nous donnerons le texte complet.

Pour écouter l'ensemble El Mawsili : Dhaw'u al çabah
Pour avoir une idée de la transcription, voici le fichier ( à la façon du chiffrage qui nous semble le plus proche de la version chantée - ça n'engage que nous -): Fichier midi.
 

Le texte de la version chantée

 

Phonétique

Daw/Uç/ça/Bah * Bay/Yan/aas/Ka/Ru

Wat/Tay/Ru/çah * Fi/Aw/Ka/Ru

Ka/An/Nu/Kha/Tib * Fi/Man/Ba/Ru

Ta/Ran/Nam/Wa/çah // Bay/Nal/Li/Qah

Refrain

Ya/Na/i/Min // Al/Lay/Lu/Rah

Ya/aa/Shi/Qin // Aq/Ba/Laç/ça/Bah

 

Nu/Ruç/ça/Bah * Lam/Ma/Ba/Da

Wan/Shar/U/Lam * Tah/Tar (Faw/Qar/) / Ri/Da

- /Wal/Ma/Lih * çub/Hu/Gha/Da

Bay/Nal/Li/Qah // Waz/Zah/Ru/Fah

Refrain

 

Parenthèse Quatre : Version algéroise du texte

Dans les anciens manuscrits (avant le Yafil) on retrouve un texte plus "consistant" en Derdj de la Nouba Maya d'Alger ! (inconnu actuellement)
On remarque que la version de Constantine (qui intervertit les couplets 1 et 2) semble construite d'après ce texte "algérois" ancien. (Remarquons l'absence de rimes médianes à Constantine; signe que l'hémistche a été fractionné).
La forme poétique (rythme) épouse celle du mètre Majzu al Rajaz en ( Quatre + quatre syllabes). (Les défauts sont signalés dans des rectangles de couleurs, les syllabes additives se placeront alors sur le premier temps)
Remarque:
Dans la poésie on parle toujours de "l'armée des ténèbres" (comme on peut le lire dans la version algéroise couplet numéro deux - Traduction: L'armée des ténèbres est repartie - vaincue -). Or dans la version de Constantine on parle de "l'armée du Jour" ; ce qui est très rare comme figure dans le répertoire (suspect quelque part).

Ce texte suggèrerait une autre façon d'interpréter le morceau en ne jouant pas de Djouab intercalaire au Matlaa (et en ne fractionnant pas l'hémistiche d'origine comme il est présenté dans le texte ancien d'Alger). L'ajout d'un refrain "Ya Naimin"de type khmassa (comme on le fait à Constantine actuellement restera dans l'esprit de ce Matlaa sans Djouab ). On fera ainsi comme dans le Meçadar Maya "Layali Al Sourour" (qui se présente sans djouab au Matlaa aussi bien à Alger qu'à Constantine). Un djouab général du Matlaa reste possible.

Traduction littérale:

Le nuage a paré la vallée de ses larmes - lorsque est apparue la lumière du jour

La lumière du jour quand elle est apparue (phrase inversée)

Elle a déployé son étendard sur (et non pas sous comme dans la version courante de Constantine) l'habit (de la vallée)

L'ami me dit :"mon coeur est parti"

On boit coupe après coupe - Ô gens endormis la nuit est partie

 

L'armée de la nuit est repartie (vaincue)

Elle nous a offert (la nuit) ses parfums d'ambre

L'oiseau est comme un orateur sur sa chaire (tribune)

Sur la branche il chante et déclare - Ô gens endormis le jour est arrivé

 

Reveille toi Ô compagnon de table, Resteras tu donc endormi

Avise ton ami et (honore) ce vin

Et observe (la déroute) de l'armée des ténèbres

La lumière - dans son éclat - la pourchasse - Levez_vous pour le déjeuner (du petit matin)

 

Laisse donc cher ami, cet endormissement

Lève toi que pour renouveler notre amitié

Ce qui fut (passé) ne recommencera jamais

On fera la fête au milieu des fleurs (blanches) - Pendant notre déjeuner

 

Regarde le jardin dans sa beauté

Qui nous dévoile les fleurs du printemps

Laisse moi faire à guise (vendre et hypothéquer)

L'amoureux n'est jamais coupable - C'est la saison des fleurs

 

Le Derdj de la Nouba Zidane

 
Transcrit sur la base d'un enregistrement de l'association les Annassers de Miliana (dans un programme Malouf).
L'introduction de type Krissi est identique à la réplique des Ghessen (A) (elle-même identique à la ligne du chant, donc non transcrite. Des ornements peuvent s'ajouter.)
 

 
Pour écouter l'enregistrement: Miliana_Malouf
   

Le Texte

 

La phonétique est sur la transcription musicale.

Traduction littérale

L'éloignement du pays a accru mon désir (de retour) * Et je ne supporte plus cet état de fatigue (qui a terni mon teint ) (dans une autre version on trouve "voyage")

Mon coeur brûle * J'ai patienté, la patience ne m'a pas profité

Dieu a choisi pour moi la séparation * C'est Lui qui me facilitera les choses (par la suite)

Parce que je suis un amoureux et je me souviens / Je passe la soirée à gémir (crier) à cause de mon d'amour (mal)

Le coeur aspire au pays (retour) / Ô Mon Dieu faites cesser ma douleur

 

Le Derdj dans la Nouba (Algérie, Maroc)

 

Tlemcen

Le Derdj se fait à Tlemcen sur un rythme "régulier" à deux fois trois temps DD_TT_. Le nombre de Derdj véritables est réduit. Les musiciens de Tlemcen ont "intégré" (à quelle époque ?) des pièces qui malheureusement évoluent sur des structures à quatre temps. Ils les ont adoptées comme Derdj malgré la "catastrophe" rythmique qui se dégage de ces morceaux. D'autres véritables Derdj ne sont pas joués avec le découpage qui convient (déplacement des syllabes par rapport aux accents naturels du Derdj.).

Alger

A Alger le Derdj n'est pas lié à un rythme spécifique. Cependant certaines pièces répertoriées comme Derdj dans les anciens manuscrits se retrouvent intégrées à la Nouba des Niqlab. Or ces pièces (citées aussi dans les clés de la Qacida religieuse) évoluent sur des structures rythmiques en deux fois trois temps exactement comme pour le Derdj de Tlemcen. La tradition a aussi retenu que le nombre des véritables Derdj est réduit (Cité par Rouanet). On peut donc penser que les pièces actuelles qui sont classées en Derdj seraient des pièces qui appartenaient à une autre catégorie de rythme. Certaines pourraient très bien être aussi des Derdj "revisités" en quatre temps.

Constantine

Le nombre de Derdj traditionnels serait réduit à trois (quatre) pièces. Des tentatives pour "enrichir" le répertoire sont tentées continuellement par l'introduction de nouveaux rythmes (voir plus haut en début de page). Le plus intéressant dans cette démarche c'est l'émergence des notions lourd et léger pour un rythme (notions qu'on retrouve dans le répertoire du Maroc, de Tunisie et même de Tlemcen avec un seul morceau connu enregistré par Cheikh Larbi Bensari au premier congrès de musique arabe au Caire en 1932; le Btayhi léger "tashar bi Ghandji al Shaffar). Cette notion si elle se confirme pourrait très bien nous expliquer un hypothétique reclassement (à Alger) de certains Btayhi rapide en Derdj. Simple hypothèse de travail pour le moment.

Maroc

La Nouba du Maroc ne connaissait pas le Derdj. Rythme introduit que vers le début du 19ème siècle. (Le Derdj de la Nouba Oshaq ne date que de 1940 et l'auteur de ces compositions est décédé en 1964). Certains maîtres ne considèrent toujours pas le Derdj comme faisant partie du patrimoine. Question: Comment est née l'idée d'introduire un Derdj dans la Nouba du Maroc ?
 

Perspectives

 
Le Derdj de Constantine est un rythme séduisant et plein de vitalité - comme on peut le mesurer à la longueur de cette page; pas trop longue on l'espère-.
L'idée serait de mieux comprendre ce Derdj pour donner de nouveaux "amis" aux trois orphelins. Le défi est donc lancé !
Quant à la transcription de la musique et du rythme, ce n'est pas la finalité de la musique. Mais cette idée d'irrationnalité dans les proportions des rythmes est peut-être une "complication" nécessaire... naturelle.
 

Alger le 02 Mai 2010

Youssef T.

 
Merci à notre ami Mouats Hafid de Skikda pour la révision de cette page et pour l'enregistrement en Zidane.
 
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Contact : groupe_yafil@hotmail.com

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